Sachant que :
- le marché des ebooks décolle ;
- l’ebook est une chose bien volatile :
- en tant que fichier (ça se perd , ça se périme, ça perd ses métadonnées…) ;
- en tant que droit (je peux aller le re-chercher chez le vendeur… tant qu’il existe, tant que les conditions n’ont pas changé…) ;
- le besoin de constituer et transmettre une bibliothèque est un besoin durable ;
comme d’autres, je me dis que :
- nous, possesseurs d’ebooks, avons besoin d’archiver nos e-bibliothèques chez un tiers-archiveur, de confiance, promis à durer ;
- nous, bibliothèques publiques (Etat, universités, collectivités locales) avons la mission de durer, ne serait-ce que pour conserver du papier.
Il devrait donc être tentant pour les bibliothèques de se positionner en tant qu’archiveur des bibliothèques numériques personnelles, en mettant en avant :
- notre capital de confiance ;
- notre pérennité ;
- notre capital de compétence en matière de gestion des livres (pour le dire vite) ;
- l’exigence de haute sécurisation génère trop de viscosité : ainsi, il est peu probable qu’un tel coffre-fort puisse être synchronisé avec une tablette ou un téléphone ;
- le fait que ce qui est archivé soit des livres résonne avec nos habitudes d’utilisateur de bibliothèques et de librairies, même sous leur forme numérique : on veut en savoir plus que le titre et trois étiquettes sur le livre, on veut pouvoir interroger une bases de données… Ou peut-être pas ? La gestion de sa bibliothèque personnelle est-elle aussi idiosyncrasique que la gestion de ses papiers administratifs ou bien tend-t-elle à coller aux pratiques des institutions ad hoc que sont les bibliothèques et les librairies ?
- le propriétaire des ebooks peut inscrire sa bibliothèque personnelle dans une dimension sociale, plus ou moins, selon ses préférences : afficher tout ou partie de sa liste ; enfin faire de la folksonomie à plusieurs ; voir s’enrichir la description de ses ebooks comme on peut aujourd’hui enrichir un catalogue de bibliothèque ; faire une recherche fédérée sur sa collection et sur d’autres collections (collections privées de l’époux, du voisin de village, du collègue, du prof, d’un inconnu au profil documentaire convergent ; collections … collectives du village, du quartier, de l’université, d’un éditeur, d’un agrégateur d’ebooks…) ; profiter de l’assistance de l’institution (gestion des formats, formation, veille technique sur les liseuses…).
- la bibliothèque tiers-archiveur élargit sa communauté ; élargit sa base de données et le potentiel de la fouille qu’elle peut y faire ; comprend mieux certains usages ; s’oblige à faire plus simple ; fait des économies d’échelle ; peut espérer faire demain ce qu’elle ne peut pas faire aujourd’hui avec les fichiers privés (prêter ! par exemple).
Facile à dire tout ça, car :
- Quid des conditions d’utilisation imposées par les vendeurs d’ebooks ? L’acheteur peut-il copier ses fichiers sur un ordinateur non personnel ?
- Quid de l’enjeu des formats ? Le marché va-t-il vers une concentration et stabilité des formats, y compris les données personnelles de lecture incorporées (marque-pages, annotations, surlignages) ? L’institution Bibliothèque saura-t-elle faire – migrer, émuler ?
- Le vendeur, l’éditeur verront-ils d’un bon oeil l’opérateur Bibliothèque se positionner ainsi ? La Bibliothèque, militante de la lecture partagée (1 objet / n lecteurs), prétend héberger la lecture privée, individuelle, exclusive ? Saura-t-elle ne pas confondre les deux rôles ? Sans parler de la possibilité du prêt entre particuliers, à distinguer du prêt de l’institution au particulier.
- Qui ? La BnF ? La BPI ? La ville de Paris ? Un SCD ? L’ABES ? ou bien un service centralisé (peut-être même sous-traité !) branché sur tous les réseaux de bibliothèque, pour afficher sa complémentarité avec les autres services de proximité d’une bibliothèque, accéder aux programme de formation, d’accompagnement dans/vers le numérique…
- Etc.
Daniel Bourrion (@dbourrion)
24 janvier 2012
Voilà une idée qu’elle est bonne. Comme ça au débotté, sans y avoir réfléchi plus, je pense OPDS (pour la mise à dispos en ‘local’) et LOCKSS (pour dépasser les frontières locales)
Daniel Bourrion (@dbourrion)
24 janvier 2012
Ah, aussi, un équivalent libre à Dropbox ?
Et puis j’y pense, ce que je vois chez Feedbooks en tant que client est très intéressant : les « livres » achetés sont inscrits dans mon compte perso et je peux les re-télécharger d’un peu partout.
Ton idée là, ce serait un mix de tout ça ?
mercure
24 janvier 2012
ouh la la en plein dans le mille !
Etienne Cavalié (Lully)
24 janvier 2012
Je bisse : particulièrement stimulant.
Yannn
24 janvier 2012
@dbourrion Merci de rebondir Daniel.
L’idée, elle peut se décliner de bien des manières, mais demeure un bon gros méchant use case, que je vis en tant que lecteur (et je suis pas le seul j’imagine) et en tant que professionnel (et je suis pas le seul je suppose).
On peut prendre le problème par différents bouts :
. patrimoine familial
. politique culturelle
. …
. marché des ebooks
Sous ce dernier angle (marché des ebooks), la recherche du confort logistique (gestion des fichiers, venant de différentes sources, vers différentes machines) et la fiabilité présumée de la grosse marque poussent chacun vers Amazon. J’aime Feedbooks, comme toi, mais est-ce suffisant pour lui confier la pérennité de mes ebooks achetés ? (Tout comme je m’aime, mais est-ce suffisant pour compter sur mes disques durs ?) J’ai le *sentiment* que l’offre Feedbooks (par exemple) gagnerait à s’associer avec un tiers archiveur de confiance, capable de survivre à Feedbooks – pace @Hadrien 😉
Mais il faut aussi pouvoir survivre à Amazon (et à Gmail, etc #cloud #engénéral).
Qui sait durer ? les universités ? l’Eglise ? l’entreprise japonaise Kongō Gumi ?
Plein de questions ouvertes. Comme toujours, faudrait des projets pilotes, pour voir… ça existe déjà peut-être ?
marlened
24 janvier 2012
Amazon tiers de confiance ? Remember le retrait pur et simple de « 1984 » et d' »Animal farm » sur les Kindle à la demande des ayant-droit, il y a 2 ans…
Peut-être les bibliothèques pourraient-elles remplir ce rôle, mais bonjour le travail de mise à niveau, de professionnalisation même, à accomplir en amont – quand on voit le souvent piètre niveau des sites web de bib, leur peu de sécurisation, les équipements info parfois vétustes… ça ne donne pas envie de confier ses fichiers, je trouve. Ca serait bien oui, pourquoi pas, mais pas tout de suite, amha.
calimaq
24 janvier 2012
« Quid des conditions d’utilisation imposées par les vendeurs d’ebooks ? L’acheteur peut-il copier ses fichiers sur un ordinateur non personnel ? »
C’est une question qu’il faut effectivement se poser… (désolé de venir faire le juriste ici…).
Cette idée ressemble fort aux système de cloud mis en place pour la musique par Amazon = Amazon Cloud Drive : http://www.themediacrash.com/2011/03/amazon-cloud-drive-pourquoi-payer-les.html
Même s’il n’est question que de stockage et pas de partage de fichiers, les ayants droit ont considéré que ce service serait illégal sans autorisation et rémunération.
Et il ne faut surtout pas qu’il y ait partage de fichiers bien sûr, sinon on n’est pas loin d’un BiblioMegaUpload !
En droit français, la question se trancherait sur le terrain de la copie privée. Car stocker implique de faire une copie du fichier. Or la jurisprudence exige pour que la copie privée soit valide que le copiste soit propriétaire des moyens de copie. Ok pour l’utilisation de son graveur, mais pas pour un magnétoscope virtuel par exemple : http://www.pcinpact.com/news/47306-wizzgo-copie-privee-magnetoscope-virtuel.htm
La question est donc ici de déterminer si, même en étant « propriétaire » de l’espace de stockage mis à sa disposition par la bibliothèque, le dispositif que vous envisagez serait conforme au cadre de la copie privée.
Ce n’est pas certain.
L’autre solution serait d’obtenir une autorisation de la part des ayants droit, mais autant dire que ce n’est pas gagné.
Néanmoins, l’idée me semble sur le principe très bonne et le besoin deviendra vite réel de pouvoir stocker en confiance nos fichiers.
TheSFReader
31 janvier 2012
J’arrive très en retard, mais ce que vous proposez ressemble « un peu » à des propositions que j’avais faites sur mon blog : « Je Veux Tout » http://readingandraytracing.blogspot.com/2011/10/je-veux-tout.html
et sa suite « J’en veux Plus »
http://readingandraytracing.blogspot.com/2011/10/jen-veux-plus.html